Stopper la destruction des micro-zones humides (sources, rus, mares, lavoirs ...)

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VOTRE DOMAINE D'ACTIVITÉ / NOM ET PRÉNOM (facultatif) 

Ornithologue

DESCRIPTION DÉTAILLÉE DU PROBLÈME 

L'eau douce, c'est l'or de demain. Elle manquera à l'humanité bien avant le pétrole.

Dans les années 50, la France regorgeait encore, sur le domaine public et chez les particuliers, de micro-zones humides : sources, fontaines, mares, lavoirs, chevelus de tête de bassin, petits ruisseaux ouverts, etc... Cette présence de l'eau, dans chaque commune, dans chaque hameau, donnait un charme incomparable à notre pays. Ces zone humides constituaient autant de refuges pour la biodiversité (plantes aquatiques, animaux...).

Malheureusement, nombre d'entre elles ont été remblayées, enfouies ou canalisées, polluées... Sans réglementation, les eaux et les lits de ces rus sont soumis à des altérations anarchiques. De nombreux propriétaires se comportent de façon irresponsable avec cette eau : détournement, comblements, busages, déversement des eaux chlorées de leurs piscines, rinçage d'épandeurs de pesticides, lavage des terrasses et des voitures avec produits, curages intempestifs provoquant la mort de la flore et de la faune... Ils n'en comprennent ni l'intérêt, ni la richesse et, quand ce cours d'eau passe chez eux, ils pensent que rien ne les oblige à respecter cette eau, à la laisser couler dans la bonne direction sur des terrains absorbants, à la garder propre. Bien souvent, rien n'explique ni ne rappelle aux propriétaires qui viennent souvent de la ville, les bonnes pratiques à respecter, à part, dans les documents d'urbanisme, l'épandage diffus des pluviales, qui, pour beaucoup, se limite aux eaux « de leurs gouttières », le terme « pluviales » portant à confusion.

Quand on élabore les PLU, qui devraient justement s'intéresser aux ressources locales, on méconnait le plus souvent complètement l'intérêt biologique et paysager de ces petites zones humides.

On a été jusqu'à éliminer pendant des décennies leur mention sur les actes notariés.

Elles ont été mises de côté ou enfouies sous prétexte que l'eau potable du réseau était bon marché et de bonne qualité. Or, en 2010, le taux légal de pesticides admis dans l'eau potable (qui devient de plus en plus chère) a été multiplié par 5...

Actuellement, la protection de la biodiversité aquatique se limite bien souvent aux seules zones humides prestigieuses de grande taille (lacs, grands étangs).

Et les particuliers qui cherchent à conserver la présence de l'eau douce naturelle chez eux, ne reçoivent pas l'appui des communes, qui considèrent que c'est « du droit privé » (alors que tôt ou tard, cette eau arrive dans les nappes phréatiques qui elles, sont un « bien commun »).

VOTRE SOLUTION POUR AMÉLIORER LES CHOSES 

Face à cette disparition dramatique des micro-zones humides, je pense qu'il est urgent de recenser celles qui existent encore et de tenter de répertorier celles qui ont visuellement disparu.

On pourrait recueillir la parole des anciens dans nos villages, consulter les archives notariées, analyser les cartes anciennes, et bien sûr utiliser des outils de prospection biologique.

Certaines pourraient être retrouvées ou sauvées.

Je crois qu'il faut absolument parvenir à une participation de chaque citoyen pour la préservation du morceau de terre dont il est propriétaire ou gérant.

Pour cela, on pourrait expliquer à la population l'intérêt de ce travail de terrain, afin que les micro-zones humides soient enfin prises en compte et considérées comme une richesse, par les élus et les habitants.

L'AVIS DU SPÉCIALISTE :

Cette proposition d'action, sur le sujet crucial de l'eau douce, est très intéressante et appelle des réalisations concrètes.

En pratique, au niveau scientifique, il faudrait donc :

1) recenser, photographier, cartographier les microzones humides de notre pays. 2) réaliser leur inventaire biologique. (Plans qualitatifs et quantitatifs). 3) dégager des espèces-témoins de micropopulations ; en liaison avec des laboratoires spécialisés, tenter d’exhiber l’importance et la valeur du flux génétique entre celles-ci. Le choix des espèces-clés (Chlorophytes microplanctoniques, Bryophytes, Angiospermes, Mollusques, Crustacés, Insectes, Amphibiens,..) serait déduit des résultats des inventaires. 4) sensibiliser la population à l’intérêt personnel et collectif de les conserver et les réhabiliter.

Déroulement :

1) la collecte des données se déroulerait pendant 2 ans, en 2 sessions de 6 mois (avril-septembre). 2) synthèse des données et analyse des résultats. Les résultats paraîtraient sous forme d’une cartographie, accompagnée d’une liste indexée des espèces par site, en référence aux normes de conservation européennes, et d’une interprétation portant sur le suivi de ces milieux.

On peut envisager l’échelle d’évaluation suivante : stations disparues ; ou exigeant un gros travail de réhabilitation ; ou de faibles investissements ; nécessitant un simple suivi ; ou de haute valeur patrimoniale impliquant une valorisation appropriée entraînant la réalisation d'une RNR (Réserve Naturelle Régionale)....

Une fois l'inventaire et la cartographie réalisés, il faudrait prendre toutes les mesures conservatoires de réhabilitation et de pérennisation de leur qualité biologique, faunistique et floristique.

Valorisation :



1) les communes impliquées pourraient tenir à disposition du public les résultats de l’enquête.

2) la cartographie obtenue, accompagnée de la liste commentée des espèces intéressant ladite commune et replacée dans le cadre départemental en relation avec les autres stations, serait signalée par des panneaux. Ceux-ci feraient ressortir, pour tous publics, l’originalité de l’écosystème et la nécessité de son intégrité.

3) ces informations, pour le domaine public, pourraient figurer sur une signalisation in situ. Pour les particuliers, un simple panonceau, hors propriété, pourrait décrire le caractère, le plan de la station, les espèces découvertes ainsi que l’implication des propriétaires dans cette enquête et leur volonté de conservation. On pourrait prendre modèle sur les panonceaux discrets des monuments historiques (ville de Paris).

4) dans les cas possibles et sous certaines conditions, une animation pourrait être organisée autour de tels lieux.

5) Des expositions itinérantes pourraient aussi être organisées dans le cadre départemental et régional.

L'AVIS DU JURISTE ET / OU DU SPÉCIALISTE :

Plusieurs améliorations légales pourraient aider à la sauvegarde et à la réhabilitation des micro-zones humides.



Il est vrai que les actes notariés ont éliminé bien souvent les servitudes d'eau qui existaient.

Mais rien n'empêche une commune de mentionner la présence de ces zones humides dans son PLU et de demander leur maintien ou leur remplacement dans une zone proche. C'était pour cette raison que les PLU avaient remplacé les POS, pour que les communes puissent tenir compte de leurs spécificités et de leurs richesses locales, comme des chevelus de tête de bassin ou des zones humides. Mais c'est bien rarement pris en compte.

A notre avis, il est urgent d'inclure aux PLU des obligations (qui seront rappelées en gras dans chaque permis de construire, seront reprises dans un arrêté municipal s'appliquant à tous les habitants, et feront l'objet d'explications détaillées dans le bulletin municipal) : L' arrêté de permis de construire devra systématiquement faire figurer les éléments suivants, même si la zone humide n'est pas apparente en surface (il existe de nombreuses poches qui apparaissent au creusement des fondations) :

Protection du réseau hydrographique alimentant la commune. Étant donné que la commune possède un réseau hydrographique, il est de l'intérêt de tous de préserver ce bien commun selon l'encadrement suivant :

Fonction hydrologique : tout cours d'eau, aussi petit soit-il, apparent sur le terrain, devra être mentionné sur la demande de permis et conservé ensuite dans son état naturel, non comblé, non busé. Si la construction exige son détournement, l'arrivée sur la parcelle et la sortie menant à la parcelle suivante seront respectées. Le lit de ce ruisseau et ses berges resteront naturels, ce qui permet l'absorption d'une partie de l'eau par le sol. Toute zone humide apparente (abreuvoir, mare) ou mise à jour lors des fouilles de construction sera respectée ou recréée à proximité, sans artificialisation, sans cimentage du fond ou des berges. Le busage vers les pluviales de la rue est interdit, les eaux présentes sur la parcelle devant rester sur la parcelle, la teneur en eau des argiles du sol étant déterminante pour bon nombre de constructions alentours (même si vous construisez vous-mêmes sur pieux pilotis). Tout puits ancien ou récent sera conservé, même s'il doit être intégré au sous sol de la construction.

Qualité de l'eau : rappel : il est interdit de déverser des produits (lavage des véhicules, des terrasses, pesticides, etc...) à proximité ou dans l'eau de ces ruisseaux. On les retrouve dans l'eau que nous buvons. Il est interdit d'utiliser les petits rus naturels comme des égouts à ciel ouvert pour y déverser l'eau des piscines.

Faune et flore aquatique : rappel : Les rus et la flore naturelle poussant sur leurs rives accueillent de nombreuses espèces utiles au jardin. Les batraciens dans leur ensemble sont des espèces protégées.

Respect des mesures : le garde champêtre de la commune est habilité à faire respecter ces mesures.

Toutes ces mesures seront reprises dans l'arrêté s'appliquant à tous les habitants. On peut y ajouter les mesures suivantes :

Inventaire : tout ru, mare, zone humide temporaire doit être porté sur un plan apporté en mairie au service environnement chargé de leur recensement. Toute présence de batracien doit être mentionnée.

Incitation financière : la commune pourrait récompenser les propriétaires qui font une bonne gestion de l'eau et des espèces naturelles par un petit apport d'argent ou une réduction d'impôts fonciers.

Éducation : le bulletin municipal peut donner des conseils et des explications sur l'intérêt de la préservation de ces milieux.

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